Jean est né à Clohars-Fouesnant le 4 août 1909 de Noël Guillou, forgeron, 28 ans, et de Marie Kergoat son épouse, commerçante, 25 ans. Le couple est domicilié à Parc ar Valanec.
Pas de renseignement particulier quant à son enfance et sa petite jeunesse si ce n'est qu'il se débrouille plus que correctement à l'école car à 12 ans, il intègre l'école primaire supérieure de Douarnenez.
En mai 1926, à 17 ans donc, il demande à passer les épreuves d'enseignement primaire supérieur. Comme épreuve pratique de travail manuel, son choix se porte étonnement sur le travail du fer.
Il intègre l'Ecole Normale de Quimper le 1er octobre 1926 et et obtient son certificat d'aptitude pédagogique en 1929.
Stagiaire durant 3 semaines à Plogastel St Germain, il effectue ses obligations militaires d'octobre 1930 à fin septembre 1931 dans le génie (transmissions).
le 1er avril 1934, à Pleuven, mariage avec Germaine Hélias, employée des Postes, née à Auray le 3 septembre 1910 et fille de Pierre Marie, employé des chemins de fer et de Marie Jeanne Palud, les deux parents étant décédés à la date du mariage de leur fille.

Fig 1 : Photo du mariage de Jean Guillou et Germaine Hélias.
Du 1er octobre 1931 à la fin de l'année scolaire 1936-1937, il est en poste à Pleuven ce qui explique son mariage dans cette commune puis il intègre l'école communale de Bénodet à la rentrée de 1937.
En 1935 il adhère au Parti communiste et devient le secrétaire de la cellule de Bénodet fondée cette année-là.
Répondant à la mobilisation, il est affecté à la 24° Compagnie radio du 17 au 30 juin 1940 puis est affecté à la Compagnie télégraphique 24/81 de Frontignan (Hérault) jusqu'au 4 septembre 1940.
Il retrouve ensuite son poste d'instituteur à Bénodet du 1er octobre 1940 au 25 septembre 1942.

Fig 2 : L'Etoile de L'Odet 1941- 1942. Jean Guillou est le premier de la rangée du haut (tout à gauche donc) aux côtés d'Inaki Larrazabal. Devant lui Jean Creff et Pierre Le Gall.
Résistance et déportation

Fig 3 : Extrait d'une attestation écrite par Daniel Trellu, ancien chef départemental des FTPF (Francs Tireurs et Partisans Français) et chef départemental adjoint des FFI (Forces Françaises de l'Intérieur) le 18 février 1953.
Jean Guillou a intégré le Front National, Le Front national, ou Front national de lutte pour la libération et l'indépendance de la France est un mouvement de la Résistance intérieure française créé par le Parti communiste français (PCF) par un appel publié le 15 mai 1941 dans le quotidien de ce parti, L'Humanité.
Comme on peut le constater sur le document ci-dessus (Fig 3), Jean Guillou est très actif dès le début 1941. Il sera arrêté par la gendarmerie de Fouesnant le 25 septembre 1942 sur dénonciation d'activités de Résistance.

Fig 4 : l'entrée du camp de Voves : Eure et Loir - La grande majorité des internés est constituée de "politiques", principalement des militants communistes
Après le camp de Voves, l'internement se poursuivit au camp de Compiègne jusqu'au 20 mai 1944. Puis ce fut la déportation vers le camp de Neuengamme en Allemagne.
En mai 1944, le Kommando extérieur du camp de concentration de Neuengamme, Watenstedt/Leinde, est aménagé pour l’utilisation de la main-d’œuvre concentrationnaire dans les aciéries de Brunswick. Le camp se trouvait à environ deux kilomètres de l’usine. Des baraquements qui avaient d’abord servi à loger des travailleurs forcés, sont utilisés pour y héberger les détenus.

Fig 5 : Carte des kommandos extérieurs de Neuengamme et situation de celui de Wattenstedt.
Jean Guillou appartenait à ce kommando et il travailla dans ces usines d'armement du 9 juin 1944 au 7 avril 1945. "Au cours du travail, des obus que l'on faisait rouler vers une centreuse, sont tombés et l'un d'eux m'a brisé l'auriculaire de la main droite, ce qui a entraîné l'amputation de ce doigt, opération effectuée par le docteur Bizien originaire de Brest, qui était également interné dans ce camp".
Lorsque, le 7 avril 1945, la SS commence à évacuer le camp, plus de 5000 détenus s’y trouvaient. Les hommes sont embarqués, avec les femmes du Kommando extérieur Watenstedt/Leinde, dans des wagons de marchandises et évacués par deux ou (plus probablement) trois trains. Les wagons de marchandises, dont certains découverts, sont bondés. L’odyssée à travers l’Allemagne du Nord dure plusieurs jours avant de se terminer, le 14 avril, au camp de concentration de Ravensbrück, (sur la carte au nord de Berlin). Beaucoup de détenus n’ont pas survécu au voyage. Jean Guillou restera dans ce camp du 14 au 30 avril 1945, camp qui fut ensuite libéré par l'armée rouge et il fut rapatrié le 20 juin 1945.
Retour à une normalité très engagée
A la rentrée scolaire 1945, on le retrouve à Quimper, enseignant à l'école Paul Bert et ce jusqu'en 1952, et il adhère à nouveau au Syndicat national des instituteurs. Toujours militant communiste, il faisait partie du secrétariat de la section communiste de Quimper (1946-1951), responsable de la propagande. À partir de 1946, il fut membre du comité de la fédération communiste du Finistère et ne fut pas réélu par la conférence fédérale de mars 1953, ainsi que trois autres instituteurs, afin de « modifier la composition du comité fédéral ».
Il fut conseiller municipal de Quimper d’octobre 1947 à 1951
L'affaire des tracts contre la guerre du Vietnam

Fig 6 : La teneur du tract distribué par Jean Guillou
1 M. Monteil : député MRP de Quimper, ancien Résistant et professeur au lycée La Tour d'Auvergne.
Le contexte national : Depuis 1947 le climat social et politique est très tendu en France et les élus communistes à l'Assemblée nationale, refusent de voter les crédits nécessaire à l'engagement de la France dans la guerre d'Indochine.
Que s'est-il passé à Quimper le 5 mai 1949 en fin de matinée ?
C'est la revue de départ du 6° bataillon colonial de chasseurs parachutistes. Cette revue attire de nombreux quimpérois et c'est l'occasion pour Jean Guillou et d'autres camarades pour distribuer leurs tracts dont la teneur est donnée par le document ci-dessus. Jean Guillou sera vivement pris à partie par d'autres parachutistes qui se trouvaient dans la foule , sera frappé au nez et arrêté par la police. Il sera condamné à 8 jours d'emprisonnement avec sursis et à 5 000 F d’amende si bien que peu après le procès, il sera exclu du conseil municipal de Quimper sur ordre du préfet.
Il enseignera à l'école Paul Bert de Quimper jusqu'en 1952 puis demandera sa mutation pour Brest, écoles de Traon Quizac, Guérin et Jean Macé.
En 1959, par un courrier en date du 29 avril adressé à l'inspecteur d'Académie, Jean Guillou sollicite un poste dans les Bouches du Rhône, mettant en avant des problèmes de santé : "Je suis pensionné de guerre à 85 % pour des maladies contactées en déportation. Un climat plus ensoleillée, moins humide, peut agir favorablement sur l'équilibre d'un organisme qui ressent de plus en plus les effets de la captivité.
Le 29 mai 1963 le TGI de Brest prononça le divorce avec son épouse Germaine Hélias et il cessa ses fonctions le 17 septembre 1964.
Il se retira à Lauris dans le Vaucluse et est décédé le 29 juillet 2007 à Cavaillon.
Souvenirs de Jean Guillou : Yvonne Nicolas complète :
" - Louis a bien connu Jean Guillou, instituteur. Il était très étonné qu'il ait vécu si vieux, étant donné son état, au retour de déportation ! Jean Guillou était un oncle à Jacqueline Kergoat- Vayer, dont les grands-parents étaient Noël Guillou-(forgeron, maire de Clohars) et Marie Kergoat). Mme Vayer a écrit un article dans le N°° 30 de Foën Izella "souvenirs 39/45 d'une petite fille, à Clohars-Fouesnant" . " Retour de Tonton Jean : J'avais un oncle, Tonton Jean, dont je n'ai aucun souvenir. Il était instituteur à Bénodet, ma tante était postière... Il était communiste. Il a été dénoncé, et arrêté par les gendarmes français, conduit au camp de Voves (près de Chartres), puis déporté au camp de Dachau #. Je me souviens de son retour. La place était noire de monde ; tous attendaient l'ambulance. Les enfants avaient l'ordre de ne pas approcher. L'ambulance arrive, je me faufile au premier rang. On tire la civière. Je vois ma Mémé Kergoat qui s'évanouit, tassée sur elle-même, toute blanche. C'est tout, je ne me rappelle de rien d'autre. Mon oncle a survécu. Il a repris son métier d'instituteur. Lui non plus n'a jamais parlé de ce qu'il avait vécu...Etions-nous prêts à l'entendre ? L'aurions-nous cru ?"
# erreur de situation.
Remerciements : Mme et M Georges Batard - Martine Riou pour ses recherches au SHD. Mme Nicolas pour son aide toujours précieuse.
Sources : Les services Historiques de la Défense à Vincennes - Les archives départementales du Finistère .
Le Maitron : https://maitron.fr/spip.php?article87893, notice GUILLOU Jean-Louis, François, Marie par Jacques Girault, Alain Prigent
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