top of page

UN SIECLE D'EVOLUTION FONCIERE A BENODET

Photo du rédacteur: Renan ClorennecRenan Clorennec

Dernière mise à jour : il y a 12 heures

L’histoire foncière du littoral constitue une entrée particulièrement parlante pour décrire la colonisation de ce « territoire du vide ». Retour sur la genèse d’une station balnéaire du Sud Finistère : Bénodet

L’étude du foncier en France métropolitaine bénéficie d’un matériau commun à l’ensemble du territoire (à  l’exception de l’Ile de  Sein et de l’Ile de Molène) :  le  cadastre.  Disponible à l’échelle communale, le cadastre a été institué pour l’impôt à partir de la loi du 15 septembre 1807, avec une mise en place progressive jusqu’au milieu du XIXe siècle. L’étude cadastrale de Bénodet permet de saisir comment le contexte foncier de la plage du Trez a évolué  entre 1830,  date  de  la  mise  en place du cadastre, et 1933, date de la  rénovation  du  cadastre  napoléonien dans cette localité. Cette étude permet   de   comprendre   comment se colonise un territoire littoral, car, en plus de la demande exogène, il semble que  la population  locale joue  un  rôle  essentiel  dans  cette dynamique.

 La plage du Trez est orientée sud-ouest, vers la baie de Loctudy.  Elle est située entre, à l’ouest, l’embouchure de l’Odet, au nord le hameau de Kerloch  et,  au  sud,  plusieurs  petits  hameaux  (Trez-Bras,  Trez-Bian). Elle  est  distante  d’environ  700  mètres du bourg de Bénodet, implanté le  long  de  la  rivière  de  l’Odet.  Au XIXe  siècle,  la  plage  sert  de  voie de  circulation  entre  le  bourg  et  les petits hameaux de Trez-Bras et Trez-Bian. La liaison avec les hameaux situés plus au sud (Kerambechennec, Poulquer...) est coupée par une petite rivière côtière. Au centre de l’anse se trouve un étang côtier d’environ 1,5 hectare.


Fig 1 : Encadrés en jaune, noms cités dans le texte. Support : Castre de 1840.
Fig 1 : Encadrés en jaune, noms cités dans le texte. Support : Castre de 1840.

Fig 2 : dessin d'André Dauchez  représentant le "loch" (espace humide) se trouvant en arrière de la plage du Trez et un bâtiment de la ferme de Trez Braz.
Fig 2 : dessin d'André Dauchez représentant le "loch" (espace humide) se trouvant en arrière de la plage du Trez et un bâtiment de la ferme de Trez Braz.

Une plage aux mains de quelques propriétaires locaux

Lors de la mise en place du  cadastre,  en 1830,  les  abords de la plage du Trez sont  majoritairement composés de landes et de terres labourables,  qui  appartiennent  à  des particuliers.  La  commune  ne possède qu’un terrain : un peu plus de 2  hectares  10  ares  de  dunes  et  de pâture,  difficilement  délimité  sur  le plan  cadastral  napoléonien.  Cette parcelle est traversée par un sentier qui relie la route et la plage. En  1830,  tous  les  propriétaires des  parcelles  de  la  plage  du  Trez habitent  Bénodet,  la  plupart  hors du   bourg.   Le   commerçant   Jean-François  Le  Clinche  et  le  boulanger Corentin Marie Cariou (qui n’est pas propriétaire foncier mais seulement domanier ) sont  les  seuls  à  habiter le bourg.  Sans compter la   commune,  huit  personnes  sont  propriétaires  des  98  parcelles  étudiées.  La plage  du  Trez  ne  compte  que  trois maisons (Alain Berrou, Jacques Jourdren   et   Guillaume   Quenechervé). Les propriétaires ne déclarent quasiment aucune parcelle de dune, mais les  landes  sont  nombreuses.  Certains  louent  leurs  parcelles,  comme Mme Cormier  qui  loue  des  terres labourables et des landes. À  Bénodet,  au  cours  du  XIXe  siècle,  les  terres  restent  majoritairement  aux  mains  de  propriétaires locaux.  Les  propriétés  de  Jacques Jourdren,  achetées  en  association avant  1830,  deviennent  son  exclusive propriété en 1850, avant d’être transmises  à  ses  héritiers  en  1857 qui  les  conservent  jusqu’en  1900 pour  la  plupart.  Alain  Berrou  transmet  les  siennes  à  son  fils  Alain  en 1877,  qui  les  transmet  en  1880  à Jean Hamon, habitant de Kerambéchennec, hameau voisin de la plage du  Trez.  Ces  transferts  conduisent parfois  à  des  possessions  étrangères  à  la  commune.  Les  parcelles  de Mme Cariou appartiennent en 1863 à  Ernest  Chauvin  des  Orières,  commis principal des contributions indirectes à Hédé (Ille-et-Vilaine), puis en 1897  à  Marie  Joseph  Chauvin  des Orières,   à   Montauban   (probablement  le  chef-lieu  de  canton  en  Ille-et-Vilaine), au lieu-dit la Chevrié. Les partages  de  terres  sont  inhabituels sur  cette  partie  de  la  commune  au cours du XIXe siècle.



Fig 3 : La plage du Trez début XX° -Fonds Le Chat musée départemental breton
Fig 3 : La plage du Trez début XX° -Fonds Le Chat musée départemental breton

Une pression balnéaire qui commence à la fin du XIXe siècle.

La  plage  du  Trez  ne  subit  pas  de pression  foncière  avant  les  années 1890,  car  Bénodet  comporte  une autre  plage,  la  plage  du  Coq,  plus proche  du  bourg.  De  plus,  le  site reste mal desservi. La plage est surtout  considérée  comme  un  lieu  de débarquement possible, que le modeste  fort  du  Coq  (corps  de  garde crénelé  modèle  1846)  construit  en 1862 à l’embouchure de l’Odet est censé empêcher, et un site d’extraction de matériaux pour la construction  (extraction  interdite  à  partir  de 1908  pour  lutter  contre  l’érosion côtière  devenue  dangereuse  pour les villas). Néanmoins, les baigneurs commencent  à  s’intéresser  au  site et,  en  1886, le conseil municipal constate qu’elle est fréquentée pendant la saison des bains par un très grand nombre d’étrangers (à la commune), ce qui conduit au classement de la voie d’accès qui part du bourg pour se rendre au  Trez  en  chemin vicinal. L’urbanisation reste exceptionnelle et débute sur la partie la plus proche du bourg. Quatre habitations seulement sont construites au cours de la seconde moitié du XIXe siècle : en 1864 une maison de 200 m2 par François  Balch,  demeurant  à  Bénodet,  en  1889  un  grand  manoir  par Léon Thornton, militaire à la retraite,


Fig 4 : "Un grand manoir construit en 1889 par Léon Thornton, militaire à la retraite"
Fig 4 : "Un grand manoir construit en 1889 par Léon Thornton, militaire à la retraite"

En  1894  une  maison  construite sur 55 m² de terrain par François Le Breton, de Kerloch (hameau voisin), en 1898 une maison par Jacques Le Caïn, propriétaire de ce terrain d’1,3 hectare depuis 1880. Seul le manoir de Léon Thornton est à l’écart, limitrophe de la plage. Les propriétaires recherchent  la  proximité  du  bourg plus que celle du bord de la mer. Le développement  balnéaire  de  cette plage est donc tardif : les baigneurs ont  commencé  à  construire  des  villas  sur  les  côtes  françaises  à  partir des années 1840, et surtout à partir des années 1850.L’intérêt  prononcé  pour  la  plage du  Trez augmente au début du XXe  siècle,  avec  l’arrivée  plus  massive de personnes extérieures à la commune.  Une  économie  balnéaire  émerge.  Quelques  cabines de  bains  sont  installées  à partir de 1908  par un maître  d’hôtel. Parisiens et Quimpérois commencent à acquérir des terrains au début des années 1900.  Constatant  le  nouvel intérêt porté sur leurs terres, certains propriétaires  sont  plus  prompts  à vendre.  Pierre  Le Caïn  fils,  qui  habite Bénodet, cède plusieurs de ses terrains, notamment à des Parisiens, comme à la  veuve  Levainville  ou à Fernand Dauchez, , et à des Quimpérois, comme le négociant en grains Pierre Kerfer.

En 1900, Jacques Le Caïn (cousin de Pierre et ancien maire de Gouesnach) vend à un autre, négociant,  parisien lui, Stéphane Gradwohl, une partie de sa parcelle (sur laquelle sera construite dans les années 1920 la grande villa Ker Madalen). Le Bénodétois François Le Clinche, propriétaire depuis 1886, vend plusieurs de ses parcelles, soit à des autochtones, comme en 1899 à Rodolphe Koechlin, ingénieur civil habitant le manoir qu’a fait construire Léon Thornton, ou en 1902 à Pierre Caoudal et Pierre Goyat, soit à des étrangers, comme en 1912 à la Parisienne Marguerite Lamoureux et Émile Léanté, entrepreneur à Étampes (Seine-et-Oise).


Fig 5 : Rodolphe Koechlin et son épouse née Emma Engel devant leur propriété de Ker ar moor.
Fig 5 : Rodolphe Koechlin et son épouse née Emma Engel devant leur propriété de Ker ar moor.

Les  parcelles  situées  le  long  de la  route  conduisant  au  bourg  sont celles  qui  sont  le  plus  facilement vendues. Mais des ventes sont également opérées au sud de la plage, aux  abords  du  village  de  Trez-Bian. Elles se font au profit de Quimpérois, comme  Samuel  Piriou  en  1897,  Alphonse  Trévidic  fils  en  1903  et  en 1911,  ou  Rosine  Paugam  en  1910.


Fig 6 : Ker Trez à Alphonse Trévidic fils
Fig 6 : Ker Trez à Alphonse Trévidic fils

Fig 7 : Ker avel moor à Rosine Paugam
Fig 7 : Ker avel moor à Rosine Paugam


Seul  François  Le  Clinche  vend  dans ce  secteur. Alors  que  les  divisions  de  parcelles étaient jusqu’alors exceptionnelles, l’attrait balnéaire encourage les propriétaires  à  émietter  leurs  parcelles et à en tirer ainsi un meilleur revenu  (immédiat).  La  première  vague  d’achats  de  terrains  s’arrête  en 1914, avec quelques rares ventes en 1915.  La  construction  de  maisons, qui  se  fait  en  continuité  depuis  le bourg,  n’est  pas  interrompue,  mais ralentie.


L’arrivée des professionnels balnéaires et des spéculateurs

 La première   vague   d’acheteurs renforce  progressivement  ses  possessions. Certes, de nouveaux acheteurs   apparaissent,   mais   certains noms    reviennent    régulièrement, soit en vue de consolider leur patrimoine foncier sur un espace réduit, soit  pour  revendre  à  court  terme  à un meilleur prix.Certains  achètent  vraisemblable-ment pour spéculer. A partir de 1901, Pierre Kerfer achète de nombreuses parcelles afin de les diviser et de les revendre. Après avoir négocié avec les  propriétaires  locaux,  il  achète ainsi  les  parcelles de la veuve Levainville  en  1904,  pour les vendre entières quand elles sont petites, comme en 1905 à Paul Canévet, négociant  en  vins  à  Quimper  (54 m²), ou divisées, comme en 1906 à Jean-Marie   Louédec, quartier-maître à puis à nouveau en 1912 au chimiste parisien Henri Vertadier. Pierre  Kerfer reste toutefois propriétaire de certaines  parcelles.  Les autochtones ne sont pas exclus de ce trafic, puisque Jean-Marie Louédec, qui possède  une maison dans le bourg depuis 1898, vend en 1911 son terrain à Henri Vertadier. D’autres  cherchent  à  se  créer  un patrimoine  foncier  car  il  s’agira  de la base de leur travail. Joseph Boissel,  maître  d’hôtel  au  bourg,  commence en 1913 à acheter des parties de  parcelles, notamment à Pierre Kerfer. En 1912, Pierre Jacq, qualifié d’aubergiste  à  Trez,  achète à Marguerite Le Fur, débitante à  la Plage une  « maison  en  cabine  de  bain » (probablement un établissement de bains)  située  sur  la  plage,  qu’il  démolit.  Il  préfère construire  en  1913 une terrasse avec une buvette sur la parcelle deRené Quéffelec, cabaretier au Croissant Kérangueven, et la même  année,  devient  propriétaire d’une parcelle située à proximité de la  route  de  la  Plage,  sur  laquelle  il bâtira  son  hôtel  en  1916.  Jean-Marie Daniel transforme au milieu des années  1920  le  manoir  construit par  Léon  Thornston  en  un  hôtel agrémenté  d’un  vaste  parc,  l’hôtel Kermoor.


Fig 8 : portrait de Jean Marie Daniel jeune.
Fig 8 : portrait de Jean Marie Daniel jeune.

Les quartiers de la Plage, générateurs de mélanges de populations

Les  transactions  reprennent  au lendemain  de  la  Première  Guerre mondiale. Comme souvent dans les quartiers de la Plage de l’époque en France,  le  quartier  de  la  plage  du Trez  en  formation  mélange  deux populations  qui  n’ont  pas  les  mêmes moyens financiers : les ouvertures des maisons sont utilisées pour étalonner  l’impôt  immobilier, jusqu’à la suppression de la contribution sur les portes et les fenêtres, par la loi du 19 juillet 1925 - 5. Plus la maison comprend de portes et de fenêtres en façade, plus le propriétaire paiera des impôts. De plus belles maisons s’élèvent dans le quartier  de  la  Plage  mais  la  population modeste  parvient  tout  de  même  à accéder  à  la  propriété,  sur  un  terrain   encore   relativement  vierge. Ainsi, Paul Rolland, couvreur entrepreneur  à  Quimper,  et  Alain  Boussard,  marin-pêcheur, 


Fig 9 ; la maison d'Alain Boussard
Fig 9 ; la maison d'Alain Boussard

voisinent  sur la route de la Plage, chacun possédant  une  maison,  pour  le  premier construite  en  1915  (12  ouvertures) et pour le second en 1904 (4 ouvertures).  Une  partie des  propriétaires villégiateurs,    d’origine    modeste, investit dans des constructions simples implantées sur des parcelles de quelques  centaines de m², ce qui est, à l’époque, plutôt restreint : Guillaume   Clément   construit   sa maison sur une parcelle de 100 m² et la couturière Joséphine Normand sur  une  parcelle  de  418 m²  (parcelle  achetée  en  commun  avec  sa sœur). La  plage du Trez  devient  un  lieu de  promenade  grâce  à  la  construction d’une route le long de la grève en 1916. Les constructions se multiplient et se renouvellent. Pierre Jacq, après avoir agrandi sa construction avec  une  buvette  en  1915  (qu’il  démolira en 1917), construit en 1916 ce qui  est  présenté  comme  une  maison  avec  29  ouvertures  (en  fait  un hôtel),  démolie  en  1920  pour  être remplacée  par  un  hôtel avec  33 ouvertures,  démoli  en  1922  pour l’Hôtel  de  la  Plage,  comportant  58 ouvertures.  Des  parcelles  plus  éloignées du débouché de la route de la Plage sont achetées, par Pierre Jacq notamment, mais le centre de l’anse du Trez, voisin de l’étang côtier, reste peu recherché.

 


Fig 10 ; L'hôtel de la plage en 1923
Fig 10 ; L'hôtel de la plage en 1923

De nouveaux propriétaires, acteurs du développement balnéaire

L'arrivée  de  nouveaux  propriétaires  au  sein  de  la  population  locale relance  le  processus  de  vente.  Le Quimpérois  Yves  Golias,  qui  entre en possession des terres des héritiers de Jacques Jourdren en 1908, après avoir commencé à diviser quelques parcelles  entre 1911  et 1914,  reprend  les  transactions  en  1925.  Il vend  généralement  à  des  Bénodétois  et  à  des  Quimpérois.  Yves  Cariou,  habitant  au  lieu-dit  Trez-Bras, reçoit  en  1924,  par  l’intermédiaire de son épouse née Sautejeau, quelques parcelles du côté de Trez-Bian. Il  ne  tarde  pas  à  en  faire  des  ventes. Dès 1924, il en vend une partie à  Maurice  Maléjac,  gérant  à  Ergué-Armel (actuellement lieu-dit au sud-est  de  Quimper).  Il  lotit  par  la  suite plusieurs parcelles : une parcelle de 26,92 ares, vendue à 11 personnes entre 1925  et 1927  (en  1932,  Yves Cariou  reste  en  possession  de  7,62 ares) ; une parcelle de 1,52 hectare, vendue  à  19  personnes  (en  1932, Yves Cariou reste en possession de  14,62  ares).  Sa  plus  grande  parcelle  a  été  viabilisée  par  1750  mètres  de  voies  d’une  largeur  de  huit mètres, avec le soutien du maire de Bénodet. Ces lotissements privés renforcent la  présence  des  Quimpérois,  très majoritaires,  et  des  Parisiens.  Quelques  acheteurs  habitent  la  commune, dont certains font probablement partie  de  la  famille  du  vendeur, comme  en  1930  Jean  Sautejeau, à  Pen-ar-Groach,  et  Pierre  Daniel époux Sautejeau. Le secteur de Trez-Bian  devient  un  véritable  quartier balnéaire,  détaché  de  la  colonisation  continue  qui  a  eu  lieu  à  partir du bourg.


Fig 11 : le lotissement Sautejeau-Cariou au Trez- Cadastre 1933 -  Archives départementales du Finistère.
Fig 11 : le lotissement Sautejeau-Cariou au Trez- Cadastre 1933 - Archives départementales du Finistère.

Le lien familial permet de transmettre l’intérêt d’une implantation sur le bord de mer. Les Le Louët sont ainsi au nombre de trois, sans que  le  lien  familial  ne  puisse  être  complètement affirmé : deux Quimpérois, Paul Le Louët et la veuve Pochard née Le Louët, s’établissent sur la plage du Trez, dans le lotissement d’Yves Cariou, au cours des années 1920, tandis que Georges Le Louët, inspecteur  des  épizooties  à  Saïgon, construit une maison en 1926 dans le  quartier  de  la  Plage  du  côté  du bourg. Certains propriétaires   bâtissent un  parc  locatif  important,  mais  ils ne  parviennent  pas  toujours  à  le conserver.  Émile  Léanté,  entrepreneur à  Étampes,   construit   deux maisons  en  1915,  dans  le  quartier de  la  plage  du  Trez  à  Bénodet.  Il vend  en  1922  ses  deux  maisons, l’une  au  Quimpérois  Victor  Heurté (12  ouvertures),  l’autre  au  Parisien Alfred  Guihlem  (12  ouvertures).  Il cesse d’être propriétaire à Bénodet en 1925.

Maurice Heitz Boyer, professeur chirurgien à Paris et médecin du pacha de Marrakech, achète en  1924  une  maison  au  Quimpérois  Félix  Darnajou,


Fig 12 : Maurice Heitz Boyer


puis,  tout  en investissant  dans  quelques  parcelles  voisines,  construit  entre 1926 et 1928 sur la même parcelle, route du  Fort,  une  villa  orientée  sur  la plage  du  Coq,  la  villa  Magdalena (aujourd’hui   inscrite   aux   Monuments  Historiques),  et  achète  en 1929 à Jean Guillou, de Pen-ar-Da-guer,  une  maison  dans  le  secteur de  Trez-Bian.  A  partir  de  1926,  il est locataire du fort, qu’il essaiera à plusieurs reprises d’acheter à la Marine. 


Fig 13 : au premier plan, le pignon sud de la maison de Felix Darnajou.
Fig 13 : au premier plan, le pignon sud de la maison de Felix Darnajou.

Ces  parcs  locatifs  bénodétois sont  toutefois  très  modestes  car, dans  certaines  stations  balnéaires, des propriétaires mettront en location  une  dizaine  de  villas  leur  appartenant personnellement.

 

Un nouvel essor  de la construction

 En  1925  est  décidée  la  construction d’une route directe depuis l’entrée de la ville vers la plage, évitant de  traverser  le  bourg  de  Bénodet, mais  elle  n’est  réalisée  qu’en  1937 (il s'agit de l'avenue de la mer). C’est  le  long  de  cette  route  que  se fera une partie de l’urbanisation balnéaire  après  la  guerre,  permettant un  nouvel  essor  de  la  construction balnéaire,  les  parcelles  limitrophes de la plage étant urbanisées. L’étang côtier  est  asséché  dans  les  années 1950,  mais  cette  zone,  occupée  en partie par un camping, reste peu urbanisée jusqu’à aujourd’hui. Comme dans de nombreuses stations  balnéaires  françaises,  les spéculateurs restent rares à Bénodet par  rapport  à  la  masse  d’individus désireux  de  construire  une  maison secondaire  au  bord  de  la  mer  ou d’accéder à la propriété. La dynamique  balnéaire  s’est  constituée  progressivement  et  relativement  tardivement  sur  la  plage  du  Trez,  avec l’arrivée   plus   massive   d’estivants, un accès facilité et une nouvelle population locale de propriétaires plus encline à se séparer de ses terrains. La plus grande modestie sociale de la  population  qui  fréquentait  cette plage,  par  rapport  à  la  plage  du Coq  par  exemple,  a  conduit  à  un émiettement  du  parcellaire,  adapté aux  nouveaux  usages  urbains  du bord de mer à partir de l’entre-deux-guerres et surtout après la Seconde Guerre  mondiale  dans  les  petites stations. Les parcelles situées le long de la plage ont toutefois été rapidement  urbanisées,  ce  qui  a  conduit, dès  après  la  guerre,  les  nouveaux arrivants  à  coloniser  des  parcelles plus en arrière, le long des voies de circulation.  L’essor  balnéaire  de  la plage du Trez de Bénodet est un bon exemple  du  développement  urbain des petites stations françaises.


 in "L'intrusion balnéaire

Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)", ouvrage paru aux   Presses universitaires de Rennes en 2008.

l'auteur, Johan Vincent est Docteur en Histoire, chercheur associé au TEMOS (FRE 2015, Université de Bretagne-Sud), et auteur de sept livres et d’une cinquantaine d’articles scientifiques sur les thématiques du tourisme balnéaire, du patrimoine maritime, des risques naturels et des enjeux fonciers.

 

 

 

 

 

 


 


 






103 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Comments


Partageons ensemble

© 2019 Renan Clorennec

bottom of page